[FOCUS BUMIDOM] La candidature pour le départ de Lisette D.

Le dossier de Lisette D. (le nom et le prénom ont été changés pour des raisons de confidentialité) donne un aperçu du parcours administratif auquel les candidats au départ via le BUMIDOM devaient se plier.  Il s’agit d’un dossier de demande d’aide au départ avec proposition d’affectation dans un centre de formation pour adultes. Le BUMIDOM prenait effectivement en charge le billet « aller » (sans retour) pour se rendre en France hexagonale (par bateau ou par avion) et proposait le plus souvent un placement en centre de formation, voire en emploi.

La couverture du dossier nous renseigne sur la candidate : la couleur rose indique que le dossier est celui d’une femme (elle est marron pour un homme) ; figure également un numéro de dossier, que l’administration attribue à toute demande. Dans ce cas, l’instruction se fait sur une durée relativement courte, cinq mois durant lesquels les situations personnelle, professionnelle et sanitaire de la jeune femme sont pris en compte : Lisette D, âgée de 21 ans, n’a pas d’emploi. Elle vient de Marie Galante et s’adresse à l’antenne de Basse-Terre, le 7 février 1967, pour y déposer sa lettre de motivation. La jeune femme écrit qu’elle a la charge d’une malheureuse famille et qu’elle souhaite partir en métropole sous les guides de votre société [le BUMIDOM]. Elle a cessé ses études à l’école primaire mais a fait de la dactylographie. Une série de documents imprimés complètent le dossier : fiche d’état civil, formulaire d’autorisation parentale, demande imprimée de migration pour exercer en qualité d’employée de maison, formulaire à signer informant que seul le billet aller est pris en charge, etc. Le dossier comporte aussi le résultat d’une enquête sociale : profession des parents, aptitude du migrant, métier désiré, conditions d’existence, famille en métropole (Lisette a deux sœurs qui vient à Partis), motif de la migration. L’enquête se conclut par un « avis favorable ».

Le dossier révèle aussi que la jeune femme n’a pas bénéficié de la « prime de trousseau » (constituée de quelques centaines de francs, de quoi acheter un pull, ou un manteau avant de partir) que le BUMIDOM donnait parfois. Enfin, la mention manuscrite « gens de maison / Crouy » présente sur la couverture désigne le centre de formation vers lequel Lisette D est orientée, celui de Crouy-sur-Ourcq. Une commune de Seine-et-Marne, une nouvelle destinée à 8000 km de chez elle. Lisette D embarque le 30 juillet 1967.

Les Archives départementales de la Guadeloupe conservent des milliers d’autres dossiers BUMIDOM, chacun constituant une fenêtre sur des brides de vie de cette jeunesse guadeloupéenne des années 1960, 70 et 80. Assez logiquement, ces dossiers ne nous renseignent que sur les premières étapes du parcours, jusqu’aux départs de Guadeloupe. Les archives sur la suite du parcours des Guadeloupéennes et Guadeloupéens partis avec le BUMIDOM sont à chercher dans l’Hexagone, notamment aux Archives nationales.

Dossier de candidat au départ via le Bumidom. Arch. dép. Guadeloupe, 1027 W 41.