[FOCUS SUR] Anne Marie, dernière esclave née au Moule

Anne Marie, dernière esclave née au Moule.

Le 26 mai 1848, la veille de l’abolition de l’esclavage, une demoiselle Lolotte Daniel, sans profession, déclare dans un courrier adressé au maire de la commune du Moule la naissance de son esclave Anne Marie, fille d’Antoinette. La démarche ne nécessite pas de venir faire la déclaration en personne ou par l’intermédiaire d’un témoin.

Anne Marie est née le 25 mai 1848 à neuf heures du matin, dans la demeure de sa maîtresse située au bourg. Elle figure dans le dernier acte du registre d’état-civil des esclaves du Moule pour l’année 1848.

C’est le maire de la commune, Jean Monnerot, chevalier de la légion d’honneur, qui rédige l’acte de naissance d’après les informations fournies par la propriétaire dans sa lettre. Il n’imagine sans doute pas vraiment qu’il signe ainsi le dernier acte de naissance d’un esclave au moule et que 4 jours plus tard, le 30 mai, il va clore la série des registres d’état-civil des esclaves du Moule ouverts en application de l’ordonnance royale du 4 août 1833. Mais la promulgation de l’abolition est passée par là, le 27 mai 1848.

Antoinette la mère d’Anne Marie a seize ans. Elle porte le numéro matricule d’esclave n° 8504. En effet une autre ordonnance royale du 11 juin 1839 stipule que les propriétaires doivent déclarer leurs esclaves à la mairie par le biais de feuilles de recensement pour l’établissement d’un registre matricule des esclaves.

Le 18 août 1848, le même Jean Monnerot est chargé cette fois-ci de donner un nom patronymique à Antoinette devenue une « nouvelle citoyenne ». Il choisit pour elle et sa fille le nom de Marnes et Antoinette en profite pour changer de prénom en devenant Anne Toinette, peut-être son surnom.

Quelques mois plus tard, une certaine Eléonore, née en Afrique vers 1802, et domiciliée à Port-Louis, se présente elle-aussi devant le maire en se déclarant la mère d’Anne Toinette. Elle reçoit logiquement le nom de Marnes.

A noter qu’en bon administrateur, Jean Monnerot, n’a pas omis d’inscrire le 26 mai 1848 l’enfant tout juste né d’Anne Toinette dans les registres matricules des esclaves de la commune, sous le numéro 10259.

Nous avons là sur trois générations et 50 ans, une généalogie qui remonte jusqu’en Afrique et une histoire familiale qui s’ouvre à nous.

Registre des esclaves du Moule, 2 janvier-26 mai 1848 : cote AD971 : 1 E 35/72archives guadeloupe esclavage

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