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La Guadeloupe « an tan Sorin », un homme inquiété pour avoir écouté sa radio trop fort.
Nous sommes « an tan Sorin ». La France, défaite par l’Allemagne, signe l’Armistice le 22 juin 1940 et change de régime politique. L’État français se substitue à la République. Le maréchal Pétain met en œuvre la collaboration avec le vainqueur. Le gouverneur Sorin qui est arrivé dans l’île le 30 avril 1940, se range du côté du régime de Vichy et applique avec zèle sa politique répressive.
Le mardi 29 octobre 1940, deux policiers en patrouille dans le centre-ville de Pointe-à-Pitre entendent un bruit suspect. Un poste de radio (TSF) diffuse de la musique de danse au 24 de la rue Gosset.
L’inspecteur de police dresse aussitôt procès-verbal. Le « coupable » est employé aux transports maritimes, marié et père de quatre enfants. Son casier judiciaire est vierge. Il a commis le délit d’écouter trop fort de la musique sur radio Haïti.
En effet, l’arrêté n° 1541 du 10 octobre 1940, paru dans le Journal officiel de la Guadeloupe du 17 octobre 1940, stipule que « l’audition de tous les postes étrangers sans distinction » est interdite dans les lieux publics ainsi que l’usage des haut-parleurs et que les appareils TSF « doivent être réglés de manière de manière à ce que leur audition ne soit pas perçue de l’extérieur des immeubles où ils fonctionnent ».
En janvier 1941, Radio Haïti n’est pas une menace directe pour les Antilles français. Haïti se rangera du côté des alliés peu après la déclaration de guerre des USA aux forces de l’Axe, le 7 décembre 1941. Cependant la Guadeloupe et la Martinique se sentent isolées au milieu de nombreuses îles étrangères. Les autorités craignent la propagation d’informations en provenance des colonies anglaise où se rendent clandestinement les dissidents. D’ailleurs la diffusion et l’écoute des émissions radiophoniques britanniques sont purement interdites en privé comme en public.
Le 20 novembre 1941, le procureur de la république ordonne un complément d’enquête. L’inspecteur de police témoigne sous serment devant le président du tribunal de première instance de Pointe-à-Pitre le 25 novembre 1940.
Malheureusement le dossier de procédure ne contient pas l’arrêt du jugement. Quel est a été le sort réservé au « coupable » ? Je vous invite à le découvrir en venant en salle de lecture…
Tribunal de première instance de Pointe-à-Pitre. Dossiers de procédure pénale, Arch. dép. Guadeloupe, 3 U 2 /46.